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La Wallonie et ses objectifs de neutralité carbone pour 2030
  • Durabilité en droit

    La durabilité est plus qu’un effet de mode. Il s'agit d'une responsabilité partagée. Jubel y contribue en réunissant différents experts qui examinent, d’un point de vue juridique, les questions environnementales et climatiques. L'importance du droit en tant qu'outil de durabilité collective et individuelle est centrale. De nombreux auteurs tentent d’y apporter une réponse à partir des différents domaines du droit. Nous pouvons citer le droit de la concurrence, des sociétés, le droit fiscal, les droits de l'homme, le droit pénal ou encore le droit européen. Le projet est sous la direction d’un comité scientifique Alain François (Hoogleraar VUB en Partner bij Eubelius Advocaten) Ludo Cornelis (Professor dr. Emeritus VUB) Sandra Gobert (Executive Director Guberna) Philippe Lambrecht (Professeur Centre de recherche interdisciplinaire Droit, Entreprise et Société (CRIDES) UCL) Jean-Marc Gollier (Advocaat EUBELIUS, Corporate Social Responsibility - Compliance (UCL - Louvain School of Management) Vous souhaitez rédiger un article sur la durabilité ? Contactez la rédaction de Jubel !

Ce 23 octobre 2023, la Commission énergie-mobilité-climat du Parlement wallon a favorablement adopté deux décrets, l’un sur l’accord de coopération de partage des objectifs belges climat et énergie et le partage des revenus de la mise aux enchères des quotas d’émissions alloués à la Belgique[1], l’autre sur la neutralité carbone[2].

Ceux-ci concrétisent, de manière partielle, les engagements wallons en matière d’énegie, de climat et de développement durable et ce, dans le cadre notamment du package Fit for 55[3], du rapport du Fonds Kyoto et du Plan national Energie-Climat pour 2021-2030 qui ne sont plus à présenter.

Les quotas d’émissions

Le premier décret concerne l’assentiment à l’accord de coopération du 14 février 2023 entre l’Etat fédéral et les entités fédérées. Il fait suite au principe de burden sharing voté en 2018 et couvre la période 2021-2030 (soit a posteriori, pour certaines années…). Malgré les dissidences entre entités fédérées, un accord partiel (uniquement pour les années 2021 et 2022) est intervenu. Cet accord vise à:

  • Un partage des revenus ETS[4] qui sont alloués à la Belgique grace au système européen de mise aux enchères des quotas d’émissions dans l’industrie (en application de la directive 2003/87/CE[5]). La Wallonie reçoit 30,65 % de ces revenus pour les deux premières années.
  • La répartition des revenus fédéraux issus de la mise aux enchères des quotas d’émissions pour les années 2015-2020. En d’autres termes, le texte permet de solder le mécanisme de responsabilisation des différentes entités (la responsabilité climat[6]) qui visait à atteindre des objectifs en matière d’efficacité énergétique dans les bâtiments. La Wallonie Wallonie reçoit 37.000.000 euros.
  • Atteindre les engagements climatiques internationaux, notamment le financement climatique international. La Wallonie participera à concurrence de 14.500.000 euros pour 2023.
  • La fixation de la contribution, à partir de 2021, de la part belge d’énergies produites à partir du renouvelable. La Wallonie contribuera à concurrence de 17.026 GWh afin d’atteindre les 13% d’énergies renouvelables à l’échelle nationale. Cette obligation provient de la directive UE 2018/2001 du 11 décembre 2018 “relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables”.

S’agissant d’un simple assentiment d’un accord politique qui n’a soulevé au sein du parlement de Wallonie, que peu de commentaires, l’examen sur le fond du texte ne présente pas un grand intérêt.

La neutralité carbone

Le second décret a, par contre, une plus grande importance pour le paysage juridique wallon. En effet, ce décret encadre et cristallise la neutralité carbone, il vise à mettre à jour le Plan Air Climat Energie (ci-après, PACE) et à abroger et remplacer le décret Climat[7],[8].

Ce texte est assez ambitieux et permet de tendre vers les objectifs imposés à la Belgique pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. De manière étonnante, les travaux parlementaires indiquent que ce texte a été soumis en urgence au parlement, laissant peu de temps pour son analyse[9].

La structure du décret se présente comme suit: les deux premiers chapitres contiennent les généralités, les objectifs et les définitions de la neutralité carbone. Le chapitre 3 est consacré au PACE (articles 6[10]à 9) évoqué ci-avant. Le chapitre 4 traite du Comité des Experts sur le climat permettant d’intégrer les “scientifiques” aux décisions politiques et le chapitre 5 de la participation citoynne. Les chapitres 6 et 7 traitent, respectivement, du droit de tirage pour les communes pour les aider dans leurs politiques climatiques et des conventions carbones conclues avec les entreprises. Enfin, le chapitre 8 contient le volet adaptation et résilience de la Wallonie pour terminer avec le châpitre 9 concernant le financement climatique international.

Concrètement, on relève les objectifs et ambitions suivants :

  • Ancrer les nouveaux objectifs climatiques, soit la réduction de 55% d’équivalents CO2 pour 2030 en comparaison avec 1990.
  • Préciser et concrétiser la mise en œuvre du PACE.
  • Renforcer le rôle du Comité des experts et de la plateforme wallonne pour le GIEC -ces experts sont surtout spécialisés dans les sciences du comportement afin d’accompagner les citoyens dans cette transition.
  • Créer un fondement légal pour le processus de participation citoyenne climatique.
  • Créer un droit de tirage pour aider les communes dans des démarches de développement durable (également nommé : « POLLEC », politique énergétique et climatique). Il s’agit d’appels à projets à l’attention des communes leur permettant une plus grande souplesse au niveau budgétaire afin de concrétiser des projets d’envergure en matière de réduction carbone.
  • Créer des conventions carbones avec les entreprises afin d’investir dans la neutralité carbone pour 2050. Il s’agit des anciens accords de branche visant à mettre en œuvre, par exemples : des projets énergétiques conjoints, la valorisation de gaz renouvelable,… Ces aides se présentent sous trois formes : les subsides AMUREBA[11] organisant un soutien sous forme de compétences techniques et humaines pour des communautés carbones ; une réduction des factures d’électricité dont la réduction sera proportionnelle aux investissements réalisés, des financements complémentaires sous forme d’appels à projet. Ce chapitre est un des chapitres les plus importants du décret car il met en place des systèmes d’aides concrets permettant une collaboration réelle entres entreprises. À cet égard, l’article 28 du projet auquel je renvoie, définit les notions de « convention carbone » et « communauté carbone ».
  • La mise en place d’un état des lieux permettant de renforcer la résilience de la Wallonie face aux changements climatiques.

Cet arsenal législatif s’ajoute à d’autres réglementations visant à atteindre les objectifs de neutralité carbone. On citera, à titre d’exemple, la stratégique wallonne de rénovation énergétique à long terme du bâtiment qui comporte des calendriers progressifs d’exigences de rénovation énergétique des logements[12]. La PACE est véritablement l’outil pratique de mise en oeuvre de ces différentes ambitions et objectifs et c’est à la lecture de ces mesures que les citoyens, entrepreneurs et autres professionnels en ce compris de l’immobilier, trouveront des réponses aux changements concrets du quotiditien.

Par ces décrets et malgré les ambitions exposées par le Gouvernement et le Parlement, la Belgique et la Wallonie parviendront-elles à atteindre cette fameuse neutralité carbone pour 2030? Réponses dans les prochains épisodes et surtout, durant la prochaine législature…

Elise Hecq, Avocate chez WERY & Collaborateur parlementaire au Parlement de Wallonie


Références

[1] Lien vers le projet de Décret : https://nautilus.parlement-wallon.be/Archives/2023_2024/DECRET/1480_1.pdf

[2] Lien vers le projet de décretd https://nautilus.parlement-wallon.be/Archives/2023_2024/DECRET/1493_1.pdf

[3] Paquet énergie climat européen.

[4] ETS: échange de quotas d’émission

[5] DIRECTIVE 2003/87/CE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEI, du 13 octobre 2003 établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil

[6] Le mécanisme de responsabilisation climat a été adopté par une loi du 6 janvier 2014 » portant réforme du financement des Communautés et des Régions, élargissement de l’autonomie fiscale des Régions et financement des nouvelles compétences » relative au mécanisme de responsabilité climat introduit au moment de la 6èmeréforme de l’Etat. Ce mécanisme a rencontré de nombreux obstacles techniques et juridiques qui ont pour conséquences d’abroger ce texte.

[7] Adopté le 20 février 2014, M.B. du 10/03/2014, p. 20402.

[8] L’article 48 prévoit une entrée en vigueur du texte au 1er janvier 2024

[9] Pages 19 et suivants des travaux parlementaires ; PW, session 2023-2024 – CRAC ,°29, 23 octobre 2023.

[10] Extrait du §1 de l’article 6 définissant le contenu du PACE : « Le plan Air Climat Energie fixe les politiques et mesures qui permettent d’atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre visés à l’article 5, d’adaptation au changement climatique, de qualité de l’air, et d’énergie, tels que fixés par le Gouvernement. Il porte sur une période de dix ans ».

[11] Le Ministre Henry explique le système AMURBA comme : « un projet de réforme qui vise à harmoniser, simplifier et mieux encadrer la réalisation des audits et des études en Wallonie », question écrite du 9 février 2023.

[12] pace-2030-adopte-gw-21-mars-2023.pdf (wallonie.be), Plan air climat énergie, 2030, version finale adoptée par le Gouvernement wallon le 21 mars 2023.

  • Durabilité en droit

    La durabilité est plus qu’un effet de mode. Il s'agit d'une responsabilité partagée. Jubel y contribue en réunissant différents experts qui examinent, d’un point de vue juridique, les questions environnementales et climatiques. L'importance du droit en tant qu'outil de durabilité collective et individuelle est centrale. De nombreux auteurs tentent d’y apporter une réponse à partir des différents domaines du droit. Nous pouvons citer le droit de la concurrence, des sociétés, le droit fiscal, les droits de l'homme, le droit pénal ou encore le droit européen. Le projet est sous la direction d’un comité scientifique Alain François (Hoogleraar VUB en Partner bij Eubelius Advocaten) Ludo Cornelis (Professor dr. Emeritus VUB) Sandra Gobert (Executive Director Guberna) Philippe Lambrecht (Professeur Centre de recherche interdisciplinaire Droit, Entreprise et Société (CRIDES) UCL) Jean-Marc Gollier (Advocaat EUBELIUS, Corporate Social Responsibility - Compliance (UCL - Louvain School of Management) Vous souhaitez rédiger un article sur la durabilité ? Contactez la rédaction de Jubel !

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