8 Mar 2021 | Employment & Benefits

Discrimination fondée sur l’âge lors du recrutement
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La discrimination fondée sur l’âge est un phénomène courant sur le marché du travail. Si un employeur ne vous embauche pas uniquement sur la base de votre âge, il peut être en infraction avec la législation applicable.

Un jugement de la Cour d’appel de Gand (confirmant un jugement du Tribunal du travail de Gand) a conclu qu’ un producteur de cuisine avait fait une discrimination fondée sur l’âge.

Un jugement de la Cour d’appel de Gand (confirmant un jugement du Tribunal du travail de Gand) a conclu que le producteur de cuisine avait fait une discrimination fondée sur l’âge (nous faisons de la discrimination fondée sur l’âge, en Belgique).

L’Union européenne veut lutter contre la discrimination fondée, entre autres, sur l’âge, en particulier dans les relations de travail[1].  La directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, ci-après dénommée « directive-cadre », a été transposée en Belgique par la loi du 10 mai 2007 relative à la lutte contre certaines formes de discrimination, ci-après dénommée « loi anti-discrimination »[2] . Ces lois n’introduisent pas les seules règles de lutte contre la discrimination[3].

La convention collective de travail n° 38 du 6 décembre 1983 relative au recrutement et à la sélection des travailleurs, modifiée en dernier lieu par la convention collective de travail n° 38sexies du 10 octobre 2008, a été déclarée universellement contraignante par l’arrêté royal du 11 janvier 2009[4]. L’article 2bis de la CCT n° 38 stipule que l’employeur qui embauche ne peut pas faire de discrimination à l’encontre des candidats en raison de leur âge, entre autres. Cette interdiction de discrimination s’applique uniquement à l’employeur qui embauche et à l’égard du candidat[5].

Afin d’étendre le principe d’égalité de traitement de la CCT n° 38 à tous les aspects d’une relation de travail, le Conseil national du travail a conclu la CTT n° 95 du 10 octobre 2008, qui interdit toute discrimination, notamment sur la base du critère de l’âge[6].

La loi anti-discrimination s’applique également à toutes les étapes du processus d’emploi telles que le recrutement et la sélection (comme dans le cas présent) ainsi que l’exercice et la résiliation du contrat de travail[7]. Cette loi s’applique aussi bien aux salariés qu’aux indépendants. L’âge est l’une des treize caractéristiques personnelles protégées énumérées dans la loi antidiscrimination[8]. La directive-cadre interdit, en matière d’emploi et de travail, la discrimination fondée sur cinq motifs exhaustivement énumérés, dont l’âge[9].

Selon la loi anti-discrimination, la discrimination directe est une distinction directe fondée sur un critère protégé qui ne peut être justifiée[10]. Dans ce cas, le producteur de cuisine a fait une distinction sur la base de l’âge. Les employeurs peuvent faire une distinction sur la base de caractéristiques non protégées liées à l’emploi qui sont importantes pour évaluer l’aptitude d’un candidat à un emploi spécifique, mais cela n’a pas été démontré dans le cas présent. L’entreprise s’est défendue en évoquant les mauvaises expériences récentes avec les travailleurs âgés, car ceux-ci auraient des difficultés avec les logiciels et abandonneraient la formation.

Selon la Cour du travail[11], le producteur de cuisinefait une distinction directe sur la base de l’âge en se basant sur des généralités et des stéréotypes.

L’article 10, paragraphe 1, de la directive 2000/78 prévoit un partage de la charge de la preuve. Il appartient au demandeur de prouver qu’un acte discriminatoire a eu lieu. Cela donne lieu à une présomption de discrimination, que le producteur de cuisine doit réfuter[12]. Il y a également un renversement de la charge de la preuve sur la base de l’article 28(1) de la loi antidiscrimination si le plaignant avance des faits qui font naître une présomption de l’existence d’une discrimination[13]. La jurisprudence belge semble être très variable. Dans certains cas, elle semble fixer des exigences assez strictes pour que la partie lésée apporte la preuve de faits pouvant donner lieu à la présomption de discrimination. Dans d’autres cas, le juge a très vite accepté une présomption de discrimination[14]. La Cour du Travail confirme que le demandeur a avancé des faits qui peuvent au moins faire présumer de l’existence d’une discrimination directe sur la base du critère de l’âge protégé.

La Cour du Travail confirme que le demandeur a avancé des faits qui peuvent au moins faire présumer de l’existence d’une discrimination directe sur la base du critère de l’âge protégé.

Par la suite, il appartient au producteur de cuisine de prouver qu’il n’y a pas eu de discrimination et donc que le principe de l’égalité de traitement n’a pas été enfreint ou que l’inégalité de traitement peut être justifiée[15]. Le producteur de cuisine pourrait démontrer, d’une part, que le demandeur ne se trouve pas dans une situation comparable ou que la différence de traitement est fondée sur un facteur objectif sans rapport avec le motif de protection et, d’autre part, que la différence de traitement est objectivement justifiée et proportionnée[16].

Les deux justifications possibles de la discrimination directe sont – soit qu’elle est objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires[17],  – soit qu’il existe une exigence professionnelle réelle et déterminante fondée sur un objectif légitime et proportionnée à cet objectif[18].

La Cour du travail suit le raisonnement du premier tribunal. Selon la Cour du travail, le fait de ne pas inviter le candidat à un entretien, en raison de son âge, n’est pas objectivement et raisonnablement justifié par un objectif légitime, car, selon le producteur de cuisine, ce sont uniquement ou principalement les candidats les plus âgés qui ont des problèmes avec les logiciels et/ou qui quittent prématurément la formation. En conséquence, le producteur de cuisine fait une distinction directe sur la base de l’âge en se basant sur des généralités et des stéréotypes qui constituent un acte de discrimination directe.

À la demande de la victime de la discrimination, de l’Unia, d’un des groupes d’intérêt ou du ministère public, le président du tribunal établit l’existence d’une violation de la loi et ordonne sa cessation[19].  Le critère d’évaluation est la possibilité d’une répétition de l’acte discriminatoire à l’avenir[20]. Il est permis de prononcer une action en cessation dans la mesure où elle vise à réprimer une pratique illégale et non un acte en particulier[21].  La Cour de cassation confirme l’idée sous-jacente du “risque de répétition” d’un acte discriminatoire[22].

La Cour du travail ordonne la cessation de la politique de recrutement discriminatoire à l’égard de M. S. et de tout autre candidat. Si le producteur de cuisine discrimine un autre candidat en raison de son âge, elle devra à Unia une pénalité de 1 000 euros par jour.

L’employeur n’est pas obligé de recruter le candidat en présence d’un acte discriminatoire. Une telle obligation affecterait la compétence restrictive du tribunal, l’autonomie des parties et le pouvoir de licenciement de l’employeur[23].

Enfin, des dommages-intérêts forfaitaires pour préjudice matériel et moral d’un montant égal à six mois de rémunération brute ont été réclamés[24]. Le premier juge et le juge professionnel font tous deux droit à la demande, mais ne suivent pas la méthode de calcul du demandeur. M. S. se voit accorder des dommages-intérêts ex aequo et bono de 25 000 euros en l’absence de données plus concrètes sur le salaire des vendeurs indépendants du producteur de cuisine. Sur la base de l’article 20, § 3 de la loi anti-discrimination, la décision devait être affichée dans l’entreprise pendant un mois, mais la publication dans les journaux a été rejetée.

Dans une autre affaire intéressante, le 26 novembre 2019, le président du tribunal du travail néerlandophone de Bruxelles a ordonné à l’entreprise publique autonome qui réglemente le trafic aérien de mettre fin à la pratique consistant à n’autoriser que les candidats de moins de 25 ans à participer à la sélection et à la formation des contrôleurs aériens[25]. Le président a conclu que rien ne justifie la distinction directe fondée sur l’âge. La “vue d’ensemble de la situation” est une exigence pour le poste de contrôleur de la circulation aérienne. Selon l’entreprise publique , l’âge a une influence négative sur cette vue d’ensemble, de sorte qu’il n’est pas en soi incompatible avec l’interdiction de discrimination qu’elle applique un âge maximum.

Le président n’a pas considéré que les arguments de l’entreprise publique concernant les objectifs légitimes de la politique sociale étaient prouvés[26].Bien que la sécurité aérienne soit un objectif légitime, l’exigence professionnelle de l’aperçu de la situation qui en découle ne justifie pas l’introduction de la limite d’âge inférieure. Le président recommande l’abandon de la politique consistant à n’admettre que les candidats de moins de 25 ans, sous peine d’une amende et de 500 euros par nouvelle infraction constatée pour chaque jour que dure l’infraction. Le verdict n’indique pas à qui reviendrait cette astreinte. Elle condamne également l’entreprise publique à payer une taxe de protection égale à 6 mois de salaire à sept candidats qui ont été rejetés en raison de leur âge[27].

La loi anti-discrimination a un large champ d’application. Dans le contexte des relations industrielles, les faits peuvent suggérer l’existence d’une discrimination directe. Dans ce cas, l’employeur doit apporter la preuve du contraire. S’il y a discrimination directe de la part de l’employeur en raison de l’âge, l’action de grève est pertinente tant qu’il n’est pas exclu que cette action soit répétée à l’avenir. Toutefois, l’obligation de l’employeur d’embaucher le demandeur ne s’applique pas. Une indemnisation forfaitaire peut être demandée ainsi qu’une publication dans les journaux et/ou dans les locaux de l’entreprise. En tant qu’entreprise, vous devez être attentif à une politique du personnel tenant compte de l’âge, dans le cadre de laquelle des mesures sont prises pour embaucher des employés plus âgés ou pour les maintenir plus longtemps au travail.

[1] 1 L. VERMEULEN, Discriminatie in arbeidsrelaties 2.0, Mortsel, Intersentia, 2020, 181.

[2] BS 30 mei 2007.

[3] 1 L. VERMEULEN, Discriminatie in arbeidsrelaties 2.0, Mortsel, Intersentia, 2020, 181.

[4] M.B. 4 février 2009.

[5] J. CHRISTIAENS, “Leeftijdsdiscriminatie tijdens de selectieprocedure”, Soc.Kron. 2018, 183.

[6] CCT nr. 95 du Conseil national du travail, 10 octobre2008, A.R. 11 janvier 2009, M.B. 4 févier 2009.

[7] Art. 5, § 2 loi anti-discrimination.

[8] Art. 4, 4° loi anti-discrimination.

[9] Art. 12 directive-cadre.

[10] Art. 7 loi anti-discrimination.

[11] 1 Tribuna du travail. Gand (division. Brugge) 13 juni 2017, Soc.Kron. 2018, 208

[12] J. CHRISTIAENS, “Leeftijdsdiscriminatie tijdens de selectieprocedure”, Soc.Kron. 2018, 184.

[13] L. VERMEULEN, Discriminatie in arbeidsrelaties 2.0, Mortsel, Intersentia, 2020, 28.

[14] L. VERMEULEN, Discriminatie in arbeidsrelaties 2.0, Mortsel, Intersentia, 2020, 36.

[15] J. CHRISTIAENS, “Leeftijdsdiscriminatie tijdens de selectieprocedure”, Soc.Kron. 2018, 184.

[16] J. CHRISTIAENS, “Leeftijdsdiscriminatie tijdens de selectieprocedure”, Soc.Kron. 2018, 184.

[17] Art. 7 loi anti-discrimination et art. 6, 1. directive-cadre.

[18] Art. 6, 1., alinéa 2 directive-cadre et art. 11, § 1 loi anti-discrimination.

[19] Art. 20, § 1 loi anti-discrimination. Voir pour des explications détaillées G. CLOSSET-MARCHAL en J.-F. VAN DROOGHENBROECK, “L’action en cessation en matière de discriminations” dans C. BAYART, S. SOTTIAUX et S. VAN DROOGHENBROECK (eds.), De nieuwe federale antidiscriminatiewetten, Brugge, die Keure, 2008, 363 e.v.

[20] J. CHRISTIAENS, “Leeftijdsdiscriminatie tijdens de selectieprocedure”, Soc.Kron. 2018, 185.

[21] D. DE PRINS, S. SOTTIAUX en J. VRIELINK, Handboek Discriminatierecht, Mechelen, Kluwer, 2005, 540- 541.

[22] Cass. 27 juni 2005, RW 2005-6, nr. 20, 787.

[23] Tribunal du travail, Bruxelles, 28 août 2009, A.R. nr. 292

[24] Art. 18, § 2 loi anti-discrimination

[25] Vz. Arbrb. Brussel (Nl.) 26 november 2019, www.unia.be.

[26] I. VAN HIEL, “Luchtverkeerdienst skeyes moet leeftijdsdiscriminatie stake”, DJK 2019, nr. 400, 2; L. VERMEULEN, Discriminatie in arbeidsrelaties 2.0, Mortsel, Intersentia, 2020, 257-8.

[27] L. VERMEULEN, Discriminatie in arbeidsrelaties 2.0, Mortsel, Intersentia, 2020, 258.

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1 Commentaires

1 Commentaire

  1. ORS Lena

    Bonjour,

    J’aimerais faire part d’une discrimination à l’embauche de la part d’un service public. Il s’agit du bureau de chômage al CAPAC. J’ai postulé à plusieurs reprises à la CAPAC, mais je n’ai jamais eu de réponse de leur part. Par contre, j’ai vu dans l’un de leur bureau qu’il n’engageaient que les jeunes de moins de 25 ans. Est-ce légal qu’un service public publie ouvertement des offres d’emplois pour n’engager que des jeunes de moins de 25 ans pour faire du travail administratif?

    D’avance merci de votre réponse.

    Réponse

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